Par Laure Cornaire  
Photo D.R.  

Le 20 Avril 1999 dans un lycée de Littletown, deux adolescents vêtus de noir ouvraient le feu sur leurs camarades. L'Amérique bien pensante montrait alors du doigt Marilyn Manson et une soit-disant "Trench coat mafia" (désignant les jeunes vêtus de longs manteaux noirs), préférant trouver ainsi un bouc émissaire tout désigné pour donner une explication hâtive à cette triste fusillade. Le mal qui corrompait les jeunes esprits était incarné et facile à repérer, il ne restait plus qu'à le combattre...
C'est sans doute ce genre de mission que s'est donné le représentant du Congrès républicain Sam Graves. Ce dernier vient en effet d'allouer un budget de 273 000 dollars à son département d'éducation afin de lutter contre la culture gothique dans la ville de Blue Springs (Missouri). "J'espère que ces fonds permettront aux officiers du Youth Outreach Unit d'identifier les leaders de la culture gothique dont nos enfants sont les victimes" s'est félicité Monsieur Graves.
Le programme dans lequel cette grande chasse à la sorcière s'inscrit devrait débuter en septembre et prévoit l'organisation de meetings destinés à informer la population sur la culture gothique qui conduit à des comportements criminels comme "l'abus de drogues et l'automutilation" (dixit Jewell Patek, porte-parole de Mr Graves). Les enseignants, ainsi que certains corps de métier directement en contact avec la jeunesse (comme les chauffeurs de bus ou le personnel hospitalier), suivront quant à eux un programme d'entraînement afin d'être capable de déceler les "signes" et "symptômes" de l'adolescent gothique. Par ailleurs, une partie du budget devrait servir à une investigation poussée permettant d'identifier les personnes impliquées dans les activités de cette contre-culture.
Devant l'absurdité d'une telle entreprise, Sam Rosenthal, patron du label américain Projekt et leader du groupe Black Tape for a Blue Girl, a préféré prendre le parti d'en rire... Il a invité les internautes de sa mailing list à envoyer des lettres décrivant son groupe et son label comme de démoniaques entreprises d'incitation à la débauche... rien de tel qu'une bonne publicité sulfureuse pour booster les ventes, a-t-il conclu !